Dès juin 2012, au congrès des Délégués Départementaux de l’Education Nationale, à Poitiers, l’adhésion des congressistes pour engager un rapprochement partenarial avec les Jeunesses Musicales de France était sollicitée. Des contacts ont été noués afin d’établir un cadre formel de coopération entre les deux associations et, à ce jour, la signature du document officiel illustre bien notre volonté réciproque d’une recherche d’épaulement dans nos actions respectives.
Une convention de partenariat a été signée. Ses différents articles permettent des résultats tangibles et contribuent à ouvrir des chemins propices à la dynamique et au rayonnement de chacune de nos deux organisations et ce, au bénéfice de tous les enfants accueillis dans le service éducatif public et, en particulier, au primaire.
Parmi les objectifs extraits de nos statuts individuels, deux méritent d’être soulignés. L’un concerne l’Union Nationale des J M F et précise son engagement à participer à l’ouverture culturelle musicale notamment en milieu scolaire. L’autre, celui de la Fédération Nationale des DDEN, affirme défendre la laïcité sous toutes ses formes. Pouvant paraître distants dans leurs intentions, ces deux objectifs concourent en fait vers les mêmes buts : La formation citoyenne et l’éducation humaniste.
Si l’école républicaine instruit, elle joue également un rôle essentiel dans l’éducation citoyenne des jeunes. Aujourd’hui, au moment où elle est chargée d’ambitieux objectifs, force est de constater le grand nombre de ses difficultés qui rendent son exercice plus compliqué à mettre en œuvre. Il n’est plus possible d’ignorer la grande diversité sociale, culturelle voire cultuelle des élèves, les problèmes qu’engendre la massification dans le primaire comme dans le secondaire, l’hétérogénéité des publics concernés, l’émergence de communautarismes ou d’intégrismes religieux et la fragile acceptation des règles de l’incontournable « vivre ensemble » au sein de l’école, de la ville ainsi que dans notre République. Sur ce sujet, tant de choses ont été dites déjà qu’il est presque inconvenant de chercher encore des mots nouveaux concernant la mixité sociale.
A la question : « Comment l’école peut-elle former le jeune citoyen ? » les DDEN, hier comme aujourd’hui, répondent inlassablement : « en faisant vivre et respecter la laïcité ». Elle constitue, en effet, le socle de nos valeurs républicaines, indissociable de l’égalité, de la liberté et de la fraternité.
L’esprit laïque relève d’une éthique, d’un ensemble de valeurs et de règles reconnues par notre république qui sert de cadre de référence aux comportements des personnes qui la composent. Mais avoir l’esprit laïque, c’est aussi avoir le regard large, curieux afin non seulement d’être ouvert à la nouveauté mais aussi être capable d’envisager d’autres pistes, d’autres chemins non bornés. C’est également la recherche constante du dialogue et de l’ouverture. Lumineuse, généreuse et conviviale, cette éthique repose fondamentalement sur l’affirmation de la valeur universelle de chaque être humain et sur la reconnaissance fraternelle des différences et des similitudes, véritable chance de construire un monde apaisé et de solidarité profonde, celle qui nous manque tant.
Ce souffle émancipateur que nous démontrons être capables de défendre, c’est aussi la recherche constante de l’épanouissement des enfants en situation de découverte, certes par une instruction générale mais aussi par une éducation culturelle et artistique car c’est dans l’art que se concentrent les valeurs humaines d’une société et donc sa culture, c’est-à-dire le « bien » collectif, le patrimoine à respecter et à transmettre dans une démarche permanente de mise en relief des valeurs communes à différentes cultures. C’est également l’éducation du choix hors des déterminismes, familial, ethnique, social ou intellectuel, bref, une éducation contre le racisme, le refus de toute discrimination et de tous préjugés quels qu’ils soient.
Ceci exige que l’école apprenne, à chacun des futurs citoyens, à voir, à entendre, à décoder, à critiquer et donc à penser par lui-même. Aussi, la raison doit-elle guider ses actes car, et nous en sommes convaincus, seule la pratique de la Raison vaccine l’esprit contre la contagion d’idéologies dévastatrices. Cependant, si l’école doit jouer ce rôle fondamental, non seulement elle ne peut pas régler tous les problèmes de société mais elle ne doit plus agir seule. Aussi, et en accord avec les intentions affichées dans le cadre de la refondation de l’école, sommes-nous désireux que des dynamiques partenariales entre l’école et les associations du mouvement d’éducation populaire puissent se concrétiser.
Depuis plus de 70 ans, la crédibilité et le savoir-faire des JMF témoignent de leur participation pleine et active à l’éveil, et à l’éducation civique et morale des jeunes. Dans le domaine culturel et musical, votre esprit d’ouverture respecte la diversité, l’appel à tous les talents d’où qu’ils viennent, classiques ou d’avant-garde, qu’ils soient confirmés ou naissants.
Nous ne sommes pas insensibles à cette ligne laïque qui anime votre politique d’action éducative et artistique en direction des jeunes. Assurément, vos actions visent à leur épanouissement personnel, à les former sans les conformer. Si la musique adoucit les mœurs, les concerts que vous organisez ouvrent et structurent les esprits. Vous amenez le concert jusque dans les zones les plus éloignées des centres culturels, notamment en milieu rural, à la rencontre des scolaires qui, malheureusement trop souvent, ont peu d’occasions de vivre l’émotion d’un spectacle musical vivant. En œuvrant pour l’équité d’offres culturelles et musicales pour toutes les écoles du territoire et en diffusant les valeurs universelles que cultivent la richesse des spectacles, fondées sur la découverte des patrimoines culturels et musicaux des diversités ethniques, vous en assurez leur respect incontestable. Vous veillez également à ce que la liberté de penser ne soit jamais confisquée par une vérité révélée. En fait, vous vous préoccupez constamment à faire en sorte que la fraternité ne soit pas un mot dérisoire.
Qui sait si vous, qui n’êtes pas forcément des habitués du discours laïque classique, vous n’êtes pas en fait, et dans l’action, l’un de ses véritables zélateurs ?
Le ministère de l’Education nationale, celui de la culture et de la communication et tous ceux qui œuvrent à vos côtés reconnaissent le rôle essentiel que vous jouez dans le domaine de l’éducation. Vous informez avec objectivité, instruisez avec intelligence, éduquez avec probité, éveillez la curiosité et distrayez avec élégance.
Ainsi, au regard des qualités qui caractérisent votre spécificité, les DDEN se déterminent pour être l’un de vos relais, au sein des écoles où ils exercent leur mission officielle.
L’article 2 de notre convention esquisse les engagements respectifs que chaque association est invitée à respecter dans le cadre de notre nouveau réseau, sorte de maillage comme peut l’être un filet de pêche et non pas une toile d’araignée où tout serait dirigé vers le centre. Tout en respectant la spécificité de chacune de nos deux associations, la synergie envisagée devrait favoriser une meilleure connaissance mutuelle et tisser des liens de sympathie chassant, alors de fait, de vieilles lunes ou autres a priori. Notre convention s’inscrit également dans une stratégie de développement de nos forces respectives. Elle marque le point de départ d’un cheminement enrichissant et fructueux. C’est tout l’esprit de la convention qui a été signée le 5 juin 2013.
Ph. G