Le fondement républicain de l’École publique
A l’heure où les citoyens doivent faire des choix essentiels, les DDEN rappellent que l’École publique laïque assume la mission fondamentale d’instruire et d’éduquer les jeunes citoyens appelés à devenir maîtres de leur destin et capables d’autonomie de jugement pour leur émancipation. Elle a aussi la mission de promouvoir une conscience collective dans la République laïque et ses autres principes fondateurs. Elle est en ce sens génératrice du vivre ensemble pour forger l’unité nationale. « L’école laïque est la pierre d’assise des institutions républicaines. » affirmait Gambetta. Le lien consubstantiel entre l’École publique et la République oblige constitutionnellement les élus à être fidèles à cette obligation constitutionnelle : « L’organisation de l’enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l’État ».
L’École est instituée pour s’intégrer à, et dans la République.
L’éducation est le but et le moyen de la République, car elle permet à chacun de devenir citoyen, et seuls les citoyens font vivre la République. Ce n’est pas une école d’État asservie aux gouvernants. C’est l’espace commun à tous, égal pour tous, institué pour tous, un lieu de formation à l’universel pour la liberté d’être soi-même. Dès la révolution est apparue la nécessité de mettre en place une institution pour assurer l’éducation de citoyens. Tel était, à l’origine, le projet de Condorcet : « Offrir à tous les individus de l’espèce humaine les moyens de pourvoir à leurs besoins, d’assurer leur bien-être, de connaître et d’exercer leurs droits, d’entendre et de remplir leurs devoirs…Ainsi l’instruction doit être universelle, c’est-à-dire s’étendre à tous les citoyens. Elle doit être répartie avec toute l’égalité que permettent les limites nécessaires de la dépense, la distribution des hommes sur le territoire et le temps plus ou moins long que les enfants peuvent y consacrer. » À l’époque de Jules Ferry, l’enjeu républicain de l’école était d’abord la République elle-même. Aujourd’hui, le consensus sur le régime est, apparemment, bien établi mais, si la République n’est plus en jeu, l’enjeu républicain de l’école n’a pas disparu pour autant.
En aucun cas la laïcité est une contre religion d’État.
L’enseignement public participe à l’équilibre de la cohésion économique, de la mixité sociale, territoriale et culturelle de la société. La montée des besoins sociaux démontre chaque jour la permanence du débat sur la place et le rôle de l’enseignement public pour assurer la cohésion de notre société, pour permettre la construction d’une société de citoyens. Les élus, de tous bords doivent être garants de cette mission fondamentale.
La République finançant et favorisant, le dualisme scolaire alimente, structurellement, la machine à fabriquer de l’inégalité scolaire. Financièrement, la puissance publique et ses représentants ne peuvent encourager les enfants à vivre séparés dans des écoles à finalités distinctes. Ils ou elles prennent ainsi le risque de banaliser le prosélytisme religieux et de mettre en danger la cohésion de la Nation. On ne peut réduire les élèves appelés à devenir citoyens, à l’appartenance religieuse de leurs parents, en juxtaposant et financer des écoles communautaires qui sont des entraves au « vivre ensemble » et à la citoyenneté.
La laïcité de l’École de la République se démarque de toute religion quelle qu’elle soit. Elle est universelle car elle promeut la liberté de conscience de chaque citoyen et citoyenne. Toucher à la laïcité de l’école, ce n’est pas proposer un modèle différent d’enseignement, c’est porter atteinte au fondement même de l’idée républicaine. C’est remettre en cause la notion même de citoyen, pour lui substituer une autre conception de l’organisation de notre société. Conception qui ferait qu’elle serait non plus composée d’hommes décidant individuellement de fonder la République, mais de communautés d’individus, chacune ayant des valeurs et coexistant dans un consensus institutionnel caractérisé par l’indifférence où les Églises et les groupes communautaires organisent la sphère publique et font financer leurs écoles par la puissance publique.
La laïcité devient inséparable de l’idée même de République.
L’électeur légitime la République, il doit donc être instruit pour que son vote s’accomplisse en connaissance de cause et dans la liberté souveraine de sa conscience. De fait, cet électeur doit être enseigné. L’école joue, ainsi, un rôle essentiel dans la formation à la citoyenneté républicaine pour que la conscience citoyenne soit libre. Par conséquent, il convient que l’enseignement reçu échappe à tout présupposé et, pour cela, qu’il soit laïque. La laïcité permet de se déterminer librement et individuellement.
Eddy KHALDI, le 1er mars 2022