Faire respecter la laïcité, pacte social de la liberté de conscience
Certains candidats envisagent de redonner leur propre « cohérence » à la laïcité sur fond de campagne électorale, pour en faire oublier le principe constitutionnel.
Les Églises, depuis toujours, ont la tentation de conquérir, voire de contourner insidieusement le dispositif législatif pour une reconnaissance institutionnelle, parfois exclusive. Parallèlement, les politiques essaient d’obtenir le suffrage moral des représentants des communautés religieuses pour asseoir une légitimité de plus en plus contestée par des électeurs de plus en plus indifférents au processus de démocratie citoyenne. Ce nombre de pratiquants des grandes religions décroit continûment alors qu’elles tendent, de plus en plus à jouer un rôle politique, institutionnel. Des responsables politiques ne recherchent-ils pas aussi ce soutien ?
Il ne s’agit pas de séparer les Églises de la société mais bien de séparer les Églises de l’État tel que le stipule l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905. Les institutions ne sont aussi ni contre ni avec telle ou telle religion, ni par ailleurs pour tel ou tel oecuménisme institutionnel de quelques cultes « reconnus ». Cette non-reconnaissance constitue la garantie du respect essentiel de l’égale liberté de conscience de toutes les citoyennes et citoyens croyants ou non. La neutralité de l’État et de toutes les institutions publiques devient strictement nécessaire pour assurer, y compris, la liberté de culte de chacune et chacun. On ne peut, dans une logique à géométrie variable, convoquer la laïcité pour telle religion historiquement établie et revendiquer la liberté religieuse pour telle autre religion émergente.
Dans notre domaine de l’éducation pour, en particulier, les sorties scolaires, peut-on faire prévaloir la liberté religieuse de l’accompagnant sur la liberté de conscience de l’accompagné ?
Une religion ne peut revendiquer la liberté religieuse de ses fidèles pour accompagner les activités du service public d’éducation. Encore aujourd’hui, l’École reste un lieu où la laïcité est contestée voire inappliquée. Faut-il ou non promouvoir, au bénéfice de tous les jeunes, une école respectueuse des consciences, celle qui à l’origine a pris une part essentielle à la mise en place de la République ? Ou au contraire, continuer, aux frais de la collectivité, d’entretenir des réseaux confessionnels et libéraux concurrents fondés sur l’alibi religieux en occultant la réalité de la discrimination sociale ? Les problèmes posés aujourd’hui par des religions émergentes doivent nous inciter au respect rigoureux du principe de non-reconnaissance de l’article 2 de la loi dite de « Séparation des Églises et de l’Etat ». La moindre entorse créée une brèche dans ce principe institutionnel de laïcité. Selon l’article premier de cette loi, l’assurance de la « liberté de conscience », de la première courte phrase précède « la garantie du libre exercice des cultes » de la seconde. Cette hiérarchie juridiquement explicite garantit les fondements juridiques de la laïcité. La non-reconnaissance institutionnelle des religions est la règle, l’État, pour respecter les finalités de l’article premier de la loi de 1905, doit rester neutre. Les croyances des citoyens sont légitimes avec comme seule limite de ne pas porter atteinte aux droits fondamentaux de la personne ni à ceux de l ‘ordre public et de la sécurité publique. Le contexte historique de la loi du 9 décembre 1905 montre à quel point celle-ci fut au meilleur sens du terme une loi de circonstance. Cependant elle constitue, aujourd’hui, une exigence nécessaire, pertinente, posant les principes de laïcité donc de liberté, d’égalité et de fraternité pour toutes et tous.
Ne remettons surtout pas en cause, en cette période préélectorale, cette loi de 1905 fondatrice du principe constitutionnel de laïcité.
Eddy KHALDI, le 15 septembre 2021