Un enseignement assurément « libre »
Le 17 mai, le ministre de l’Éducation nationale a signé un protocole léonin sur la mixité scolaire avec le secrétaire général de l’enseignement catholique, par lequel cet enseignement confessionnel s’engagerait à augmenter la part de ses élèves boursiers, mais étrangement sans aucune obligation, au nom de « sa liberté ». Avec à peine plus de 11% des élèves, il n’accueille que 3 fois moins de bousiers que l’enseignement public.
Le 1er juin, un rapport de la Cour des Comptes, seul organisme officiel qui, depuis plus de 63 ans après la loi Debré, rappelle les moyens consacrés par l’État à ces établissements. Ils s’élevaient à 8 milliards d’euros en 2022, hors tous les financements publics multiples non répertoriés ici ou ailleurs, des collectivités locales.
Ce rapport inédit, qui relève plus de l’Éducation nationale que de la Cour des Comptes, mentionne que les écoles privées peuvent choisir leurs élèves et note une très forte aggravation du taux de mixité sociale « en fort recul depuis une vingtaine d’années ». Ainsi, la Cour des Comptes appelle à revoir les termes du Code de l’éducation dans lequel les établissements d’enseignement privés, seuls légalement signataires des contrats avec l’État, ne modulent pas les moyens alloués en fonction des critères sociaux et du nombre d’élèves défavorisés accueillis. La publication décrétée par la justice, oblige, depuis moins de six mois, le ministère de l’Éducation nationale à publier les indices de positionnement social (IPS) de chaque établissement public et privé. Ces derniers sont très largement favorisés. À cet effet, le 3 avril, le sénateur communiste Pierre Ouzoulias déposait, pour respecter les dispositions législatives du contrat avec l’État, une proposition de loi « visant à autoriser la puissance publique à conditionner les subventions accordées aux établissements privés sous contrat à des critères de mixité sociale et scolaire ». La Cour des Comptes atomise des antiennes racoleuses de l’enseignement catholique soulignant l’inexistence de la mise en oeuvre des obligations contractuelles avec l’État. Ainsi, la « liberté de choix des familles » n’est que celle des établissements essentiellement catholiques pour 96%. De plus, la réussite scolaire des établissements privés n’est qu’une « apparence », celle-ci « …étant fortement corrélée à l’origine sociale des élèves ». Ceux-ci réussiraient tout aussi bien dans l’enseignement public. Des obligations imaginaires, des contrôles financiers « peu ou pas réalisés » et localement « non mis en oeuvre », un contrôle pédagogique « exercé de façon minimaliste », et des contrôles administratifs des inspections générales qui ne sont mobilisés « que ponctuellement lorsqu’un problème est signalé ». Les moyens publics sont répartis, « sans équité territoriale » par les structures ecclésiales, exclusivement catholiques, secrétariat général et directions diocésaines : « La gestion des moyens, des ouvertures et des fermetures de classes est principalement déléguée aux réseaux d’enseignement privés… ». C’est un enseignement plus associé à l’Église qu’à l’État qui assure la visibilité sociale et exclusive d’une confession.
Il aura fallu près de 64 ans, depuis le 31 décembre 1959, date de promulgation de la loi Debré, pour que la Cour des Comptes, qui jusqu’ici a toujours refusé de mettre en place un rapport sur le coût du financement public des établissements d’enseignement privés, contribue à dévoiler partiellement des constats que le ministère de l’Éducation nationale s’évertue à ignorer en continuant à concéder illégalement des libéralités au nom de la mixité scolaire, à une structure ecclésiale dont on sait que ses finalités et sa gestion libérale sont la source à l’origine de toutes ces discriminations communautaristes sociétales et sociales.
Soyons très attentifs, actuellement, à ceux qui, plutôt que de l’abroger, comme le revendiquent les DDEN, dans toutes leurs résolutions, souhaiteraient « donner un second souffle à la loi Debré ». Dans cette nouvelle brèche libérale doublée d’une complicité cléricale, certains ont le projet d’organiser, au nom de l’autonomie, une relation contractuelle avec les établissements publics afin de les aligner sur le mode de gestion des établissements d’enseignement privés pour une mise en concurrence. La « guerre scolaire » loin d’être terminée se déroule sous nos yeux. Eddy Khaldi, 4 juin 2023
Le 17 mai, le ministre de l’Éducation nationale a signé un protocole léonin sur la mixité scolaire avec le secrétaire général de l’enseignement catholique, par lequel cet enseignement confessionnel s’engagerait à augmenter la part de ses élèves boursiers, mais étrangement sans aucune obligation, au nom de « sa liberté ». Avec à peine plus de 11% des élèves, il n’accueille que 3 fois moins de bousiers que l’enseignement public.
Le 1er juin, un rapport de la Cour des Comptes, seul organisme officiel qui, depuis plus de 63 ans après la loi Debré, rappelle les moyens consacrés par l’État à ces établissements. Ils s’élevaient à 8 milliards d’euros en 2022, hors tous les financements publics multiples non répertoriés ici ou ailleurs, des collectivités locales.
Ce rapport inédit, qui relève plus de l’Éducation nationale que de la Cour des Comptes, mentionne que les écoles privées peuvent choisir leurs élèves et note une très forte aggravation du taux de mixité sociale « en fort recul depuis une vingtaine d’années ». Ainsi, la Cour des Comptes appelle à revoir les termes du Code de l’éducation dans lequel les établissements d’enseignement privés, seuls légalement signataires des contrats avec l’État, ne modulent pas les moyens alloués en fonction des critères sociaux et du nombre d’élèves défavorisés accueillis. La publication décrétée par la justice, oblige, depuis moins de six mois, le ministère de l’Éducation nationale à publier les indices de positionnement social (IPS) de chaque établissement public et privé. Ces derniers sont très largement favorisés. À cet effet, le 3 avril, le sénateur communiste Pierre Ouzoulias déposait, pour respecter les dispositions législatives du contrat avec l’État, une proposition de loi « visant à autoriser la puissance publique à conditionner les subventions accordées aux établissements privés sous contrat à des critères de mixité sociale et scolaire ». La Cour des Comptes atomise des antiennes racoleuses de l’enseignement catholique soulignant l’inexistence de la mise en oeuvre des obligations contractuelles avec l’État. Ainsi, la « liberté de choix des familles » n’est que celle des établissements essentiellement catholiques pour 96%. De plus, la réussite scolaire des établissements privés n’est qu’une « apparence », celle-ci « …étant fortement corrélée à l’origine sociale des élèves ». Ceux-ci réussiraient tout aussi bien dans l’enseignement public. Des obligations imaginaires, des contrôles financiers « peu ou pas réalisés » et localement « non mis en oeuvre », un contrôle pédagogique « exercé de façon minimaliste », et des contrôles administratifs des inspections générales qui ne sont mobilisés « que ponctuellement lorsqu’un problème est signalé ». Les moyens publics sont répartis, « sans équité territoriale » par les structures ecclésiales, exclusivement catholiques, secrétariat général et directions diocésaines : « La gestion des moyens, des ouvertures et des fermetures de classes est principalement déléguée aux réseaux d’enseignement privés… ». C’est un enseignement plus associé à l’Église qu’à l’État qui assure la visibilité sociale et exclusive d’une confession.
Il aura fallu près de 64 ans, depuis le 31 décembre 1959, date de promulgation de la loi Debré, pour que la Cour des Comptes, qui jusqu’ici a toujours refusé de mettre en place un rapport sur le coût du financement public des établissements d’enseignement privés, contribue à dévoiler partiellement des constats que le ministère de l’Éducation nationale s’évertue à ignorer en continuant à concéder illégalement des libéralités au nom de la mixité scolaire, à une structure ecclésiale dont on sait que ses finalités et sa gestion libérale sont la source à l’origine de toutes ces discriminations communautaristes sociétales et sociales.
Soyons très attentifs, actuellement, à ceux qui, plutôt que de l’abroger, comme le revendiquent les DDEN, dans toutes leurs résolutions, souhaiteraient « donner un second souffle à la loi Debré ». Dans cette nouvelle brèche libérale doublée d’une complicité cléricale, certains ont le projet d’organiser, au nom de l’autonomie, une relation contractuelle avec les établissements publics afin de les aligner sur le mode de gestion des établissements d’enseignement privés pour une mise en concurrence. La « guerre scolaire » loin d’être terminée se déroule sous nos yeux. Eddy Khaldi, 4 juin 2023